Autoproduction d’électricité décentralisée au Québec

par Lili Haury Toutes les personnes qui utilisent des systèmes d’énergie renouvelable sont des autoproductrices d’électricité. On parle d’autoproduction d’électricité décentralisée ou de production distribuée quand le système est raccordé au réseau des services publics et que la production est réalisée en dehors des grandes centrales. En novembre dernier, Hydro-Québec Distribution a déposé une requête auprès de la Régie de l’énergie afin de recevoir sur le réseau les petits autoproducteurs d’électricité dont la puissance du système serait inférieure à 50 kW (puissance installée). Dans le cas du micro éolien, une puissance installée de 50 kW peut fournir de l’électricité à six ou dix maisons suivant le potentiel éolien du site et la consommation de chaque foyer. Seules les sources d’énergie renouvelable, telles l’énergie éolienne, le photovoltaïque, l’hydroélectricité, les biogaz et la biomasse forestière, seront admises. Toutes les filières utilisant des hydrocarbures seront exclues. La proposition d’Hydro-Québec précise: - le client autoproducteur devra payer la redevance d’abonnement et sa consommation nette d’énergie, pour chaque période de facturation; - lorsque pour une période de facturation donnée la production du client sera supérieure à sa consommation, cet excédent sera ajouté à une banque de surplus qui servira à réduire la facture des périodes de consommation subséquente; - une fois l’an, la banque de surplus sera remise à zéro, sans rétribution à l’autoproducteur (Extrait du Communiqué 26/11/05 de Hydro-Québec). L’autoproduction d’électricité décentralisée permettra de produire et de "vendre" aux services publics des kWh jusqu’à concurrence de la consommation annuelle. Toutefois, en fin d’année, le surplus restant ne sera pas racheté. Pour ce faire, un système de mesurage net pourrait être instauré, avec par exemple un compteur à deux registres, l’un indiquant la consommation et l’autre la production. Dans certaines provinces du Canada, les autoproducteurs reçoivent une facture nette (le kW est acheté au prix de détail ou au-dessous du prix de détail). Voir Le Mercure Solaire d’énergie Québec Solaire, Été 2004, Vol.14 – No 2. Aux États-unis, en Europe et au Japon, l’autoproduction d’électricité décentralisée avec achat de la production est une pratique où, sauf pour certains de ces pays, il en est tout autrement, le kWh étant acheté à un prix supérieur. En effet, certains coûts sont réduits, autant du point de vue économique qu’environnemental, comme les coûts et les pertes de courant dus au transport qui sont réduits dans le cas d’une électricité produite et consommée sur place. Les économies de coûts environnementaux comparativement aux sources conventionnelles peuvent être de l’ordre de: (en ¢/kWh) Extrait du document Environmental Costs of Energy de R. Ottinger - Énergie éolienne 0,0 à 0,1 - Énergie solaire 0,0 à 0,5 - Biomasse 0,0 à 0,8 - Gaz naturel 0,8 à 1,2 - Charbon 2,9 à 6,6 - Pétrole 3,1 à 7,7 - Nucléaire 3,3 L’électricité au Québec n’est pas chère, c’est vrai, mais les effets de cet avantage sont un mythe dévastateur: nous sommes très énergétivores. Dans notre dernier article, nous expliquions que nous pouvions tous réduire de 30 % notre consommation, ce qui éviterait de construire d’autres mégacentrales, la solution n’étant pas non plus d’augmenter les tarifs. Par exemple, nous consommons trois fois plus de kWh et nous payons autant par année que les habitants de l’Allemagne qui consomment eux trois fois moins mais paient 3 à 4 fois plus cher le kWh. En conclusion, au point de vue énergétique, nous sommes aux prises avec les mêmes problèmes que certains pays comme ceux de l’Europe ou le Japon, mais leurs gouvernements offrent des programmes de soutien à l’autoproduction d’électricité décentralisée bien supérieurs. Voir notre article dans le Mercure Solaire de Janvier 2002 inséré dans la Maison du 21ème siècle Avec les systèmes éoliens et solaires photovoltaïques, le choix de l’autoproduction décentralisée augmente les alternatives offertes aux futurs utilisateurs et utilisatrices de systèmes d’énergies renouvelables quant au type de projet: autonomie complète ou partielle, connecté au réseau ou hors réseau. Au Québec, nous avons déjà deux installations d’autoproduction décentralisée dans le domaine des collectivités et du résidentiel. Depuis plus d’un an, à l’Éco-Centre de Rivière-des-Prairies, deux systèmes interconnectés au réseau fonctionnent, soit un système hybride éolien et un solaire photovoltaïque. Et, depuis peu, une toiture solaire de 3200 watts a été installée en Montérégie par un constructeur de Maison Novoclimat. Il reste à Hydro-Québec à finaliser certains tests avant que le retour sur le réseau soit définitivement mis en fonction. Un projet d’autoproduction d’électricité décentralisée avec les systèmes éoliens et/ou solaires photovoltaïques permet d’éviter l’achat de certains composants, d’autres par contre seront plus chers. Toutefois, les autoproducteurs pourront investir davantage sur l’achat de générateurs d’énergie plus puissants. Dans notre prochain article, nous parlerons d’un système hybride connecté au réseau. L’autoproduction décentralisée viendra faciliter bon nombre d’initiatives écologiques de plus grande envergure, que ce soit pour les collectivités, les écovillages, les entreprises vertes, les bâtiments publics ou agricoles. En effet, maintenant lorsqu’il sera question de mini centrales d’autoproduction d’électricité décentralisée, la période de retour sur investissement sera plus courte puisqu’on pourra aussi vendre aux services publics les kWh produits avec les systèmes d’énergie douce. L’objectif écologique et économique étant qu’après cette période, l’électricité produite soit gratuite grâce à l’énergie du vent et du soleil. Le fait de produire chez soi, "dans son jardin", qu’il s’agisse d’énergie ou autre, aura pour effet de nous rapprocher de notre consommation et de ses impacts sur l’environnement, mais aussi de nous rappeler encore plus que nous pouvons économiser l’énergie tout simplement.

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