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L’impact du tissu social sur la santé d’une communauté: l’effet Roseto
par Vicky Veilleux
Les relations interpersonnelles sont de plus en plus reconnues comme étant LE facteur essentiel ayant une influence sur la santé.
L’effet Roseto
Au début du siècle, plusieurs familles d'immigrants italiens débarquèrent en Pennsylvanie de l'Est. Ils furent tout d'abord chassés des établissements déjà existants par les habitants d'origine pour finalement s'établir à ce qui deviendra la petite ville de Roseto, où ils créèrent leur propre culture et systèmes de coopération.
Dans les années 60, des chercheurs s'intéressèrent à Roseto, intrigués par le taux de mortalité cardiaque anormalement bas, en contraste avec celui des municipalités voisines. Ils tentèrent par maints examens, analyses et recherches de démontrer un lien de causalité entre la santé exceptionnelle des habitants et leur génétique. Les conclusions furent claires: le phénomène dépassait l'hérédité et ne pouvait être analysé au microscope.
Peut-être était-ce alors leur style de vie ou la nourriture méditerranéenne? Et non, les descendants italiens de Roseto avaient adapté leur cuisine à l'américaine, faisant frire leurs boulettes de viande, consommant en abondance des sucreries, du vin, des cigares et travaillant pour la plupart dans des usines où les conditions de toxicité dépassaient probablement celles auxquelles était exposé le travailleur américain moyen.
Autre fait intéressant, les chercheurs découvrirent que les taux de criminalité et d'applications pour l'assistance publique y étaient nuls. Le secret de Roseto n'était donc pas dans la sauce tomate... Mais qu'avait donc cette bourgade d'à ce point unique?
LA COMMUNAUTÉ! Et oui, toutes les maisons de Roseto abritaient un minimum de trois générations familiales. Ces familles tissées serrées, supportantes et indépendantes, pouvaient compter les unes sur les autres en cas de crise. La structure sociale de la communauté au sens plus large était stable, prévisible, et tout le monde y avait son rôle bien défini à jouer. Les personnes âgées n'étaient pas mises à l'écart mais plutôt hautement considérées pour leur sagesse et expérience. Les rassemblements spirituels et les célébrations étaient fréquents et formaient la colle sociale de la collectivité. La forte mentalité catholique où il est mal vu d'étaler ses richesses faisait en sorte que les différences de classe n'étaient pas visibles à Roseto.
Bref, ce qui rendait les gens de Roseto exceptionnellement en santé, c'était la qualité de leurs interrelations! "People are nourished by other people", peut-on lire dans le rapport d'enquête. Depuis, l’expression « effet Roseto » est utilisée pour illustrer l’impact du tissu social sur la santé d’une communauté.
Un sentiment de sécurité
J'observe ce phénomène dans ma vie au quotidien. À chaque soir, lorsque j'écris mon journal de gratitude, je constate, presque sans exceptions, que 70% ou plus des évènements par lesquels je me suis sentie nourrie dans la journée sont reliés à mes relations. Les gens autour de moi sont ma richesse, et notre interaction la source de ma créativité! Il ne serait pas étonnant alors que l’épanouissement trouvé dans cette expression partagée résonne dans chacune de mes cellules, engendrant des vibrations bénéfiques pour l’ensemble de mon organisme.
De la même façon, le fait de vivre dans une petite ville dynamique et de me savoir bien entourée contribue à mon sentiment de sécurité sur les plans physique, matériel et affectif. Le sentiment de sécurité, couplé à de saines habitudes de vie, a une incidence cruciale sur notre niveau de stress. Stress que l’on sait précurseur de la majorité de nos maladies contemporaines.
Dans mon village, il est pratiquement impossible de se retrouver sans ressources devant une situation difficile. Je sais qu’il y aura toujours quelqu’un pour m’accueillir, m’assister ou me prêter une oreille compatissante. Je connais par leur nom la majorité des personnes que je croise dans la rue et me sens confiante de laisser mon enfant courir à sa guise dans les modules de jeux du parc municipal. Un groupe électronique pour les familles a été créé, nous permettant d’afficher nos besoins et ressources et de nous supporter mutuellement.
Lorsqu’une jeune mère ayant habité plusieurs années dans la région est subitement décédée, nous avons eu l’opportunité de nous réunir dans l’espace sacré du centre de yoga pour lui rendre hommage et plusieurs dons et mots de soutien ont pu être acheminés vers la famille dans les semaines qui suivirent par le biais d’un petit autel érigé au magasin d’aliments naturels.
Lorsqu’un jeune homme a eu un accident de travail grave, tout le village s’est rassemblé pour un évènement-bénéfice dans la salle de spectacle communautaire, chacun lui témoignant son support par sa présence ou ses talents. Une table (précieuse puisque peinte à la main!) qui avait été dérobée à cette même salle de spectacle communautaire a été retrouvée par la force de la communauté. Les lieux d’interaction, d’expression artistique ou de pratiques diverses pour le corps et l’esprit abondent dans notre petite municipalité d’à peine 4000 habitants.
Par ces liens communautaires, mes besoins de partage, de sens et d’appartenance sont de plus en plus comblés.
Bien sûr, plusieurs pas restent à faire. Il y a certes place à l’approfondissement des relations multigénérationnelles et au développement de ressources et d’espaces pour que l’on puisse mieux prendre soin les uns des autres. La proximité au quotidien et la mise en commun de certains biens matériels contribueraient également à notre épanouissement collectif. Et d’un point de vue plus universel, il nous faudra nous harmoniser et reconnaître en toute conscience que nous sommes UN avec l’univers vivant dans lequel nous évoluons afin de se rallier volontairement derrière des objectifs communs, au service de la vie.
Si nous nourrissons avec engagement ce lien qui nous unit et choisissons de grandir pas à pas dans la communauté, il y a fort à parier que nous évoluerons resplendissants de santé !