Nations Unies, en Couleurs !

par Frère Ours 3e rassemblement mondial de l’arc-en-ciel (mars 2003) Après 6000 kilomètres en avion, 33 heures d’autobus et 8 heures d’automobile, j’arrivais enfin près du but! J’allais atteindre la destination tant attendue depuis l’été passé. J’arrivais incessamment sur le site du 3ième rassemblement mondial de la famille de l’arc-en-ciel de lumière vivante1 du Brézzzil!!! C’est au rassemblement annuel de la famille québécoise, à la pleine lune d’août 2002, que nous avions pris la décision, lors d’un cercle de vision, d’aller représenter le Québec en force. Que nous irions partager avec le monde entier l’énergie fabuleuse que nous avions générée ensemble. Car la famille québécoise de l’arc-en-ciel est remarquablement lumineuse ces dernières années. Et à ce jour, la vision prenait forme. La synchronicité fidèle au rendez-vous, nous arrivions juste à temps pour bâtir le «seed camp»2, ou camp de semence, qui est la première étape du rassemblement. La graine qui fleurira dans un paroxysme de sensations multicolores, qui fanera avec grâce et qui, finalement, donnera de bons fruits sucrés et juteux, porteurs de nouvelles semences. Déjà, nous étions 8 québécois. Une vraiment belle gang! Encore quelques heures de route dans la pampa brésilienne, une ascension en montagne chaude et ardue, et le paradis était à nous. Le groupe était constitué d’espagnols, d’israéliens, d’une ravissante finlandaise, d’américains, et j’en passe. Je dégustais pleinement ma naissance dans la famille mondiale, et quel accouchement! Nous nous apprivoisions en rythmes et chansons, en sourires et pâmoison. Ce fut le début d’une belle histoire d’amour. Le site était enchanteur. Une superbe rivière nous offrait une piscine naturelle, rafraîchissante et parfaite pour nos besoins. Des chutes et cascades à profusion et sur les rives de cette rivière, un climat tropical. Une petite jungle arborait des arbres aux fleurs jaunes et violettes, des singes et des serpents, ainsi qu’une ribambelle d’espèces animales et végétales. Sur les hauts plateaux de cette vallée, nous avions une vue panoramique à couper le souffle, sur les montagnes avoisinantes. Une splendide petite grotte et, par enchantement, le coeur du rassemblement était une mine de cristaux, où nous cueillions les quartz comme des fraises. Et pour abreuver notre soif de vie, trois sources cristallines (c’est le cas de le dire!) coulaient des sommets rocheux. Après presque un an de recherches, c’est à la dernière minute que l’endroit fut découvert, dans la «Chapada Diamentina», un parc national de l’état de Bahia, qui comme son nom l’indique, est célèbre pour ses pierres précieuses et ses chutes spectaculaires, sans parler des panthères et cactus. Tout était maintenant à faire, pour accueillir la famille qui déferlerait bientôt par centaine. Le «welcome center», la cuisine, le village des enfants, l’aménagement du feu central, etc… Les braves qui n’ont pas été fêter au carnaval (samba, conga, cachassa3, et tout le tralala), ont mit la main à la pâte avec joie. Plus la lune grandissait, plus la famille grossissait. De tous les continents, de toutes les couleurs, de toutes les cultures, nos frères et soeurs, aux sacs à dos chargés arrivaient en grand nombre (on appelle parfois la famille arc-en-ciel, le peuple tortue, car nous voyageons avec notre maison sur le dos). 1 Voir article dans Aube no 2, page 69 2 Le mouvement arc-en-ciel fut fondé aux États-Unis, en 1972, ce qui explique la présence de plusieurs termes fonctionnels en anglais. Il faut faire avec! 3 alcool artisanal brésilien, à base de canne à sucre. 4  Hutte de sudation : rituel amérindien de purification. 5 voir article dans Aube no 1, pages 16 et  18, sur le conte. 6 Voir article dans Aube no 3 7  Et oui! J’utilise ici seulement le masculin, car la présence féminine québécoise s’est fait sentir par son absence, presque totale. Environ une sur 25, 4% de yin, 96% de yang. Sociologues, à vos crayons! 8 Terme en Sanskrit, langue sacrée de l’inde, shanti = paix, seena = gardien 9 Grande fête religieuse de l’inde où des centaines de milliers de personnes se rassemblent près du Gange, et qui a lieu tous les 4 ans. La prochaine étant cette année, en septembre. 10 Tradition empruntée aux amérindiens, qui donne au porteur du bâton le pouvoir de s’exprimer comme bon lui semble, laissant les autres dans l’obligation d’écouter. 11  Voir article dans Aube no 5, page 298. 12  Termes amérindiens désignant l’Amérique du Nord. Au climat de cette grande célébration de la mère terre et de paix pour ses enfants, dans le grand jardin sacré, à la pleine lune de mars 2003, nous étions environ 1000 joyeux(euses) lurons(onnes), constitués de représentants(antes) de 46 pays de la planète. Puis, tout doucement, l’énergie redescendait et la foule diminuait, accompagnant ainsi la lune décroissante. Je ne saurai vous raconter tous les points marquants de ce rassemblement mondial, car chaque jour apportait sa part de magie et de moments inoubliables. Cependant, quelques petits miracles méritent d’êtres partagés. Nous eûmes droit à un grandiose arc-en-ciel double, dont la partie inférieure reflétait directement sur la montagne. Et ce, le jour même de l’inauguration du sweat lodge4 de Skywalker, un autrichien-allemand qui suit la tradition Lakota du Sud-Ouest des États-Unis.  Nous étions surexcités et hurlions de joie. Une grande amitié naquît entre les habitants d’Arapiranga, un petit village typique d’agriculteurs fruitiers et de canne à sucre, tout près du «rainbow». Ils ont même signé une pétition pour que nous restions sur le site ( c’est une longue histoire dont je vous épargnerai les détails). Aux dires des anciens, habituellement les gens veulent se débarrasser de nous, et là, nous étions recus comme des rois et reines. Sur le seuil d’une autre guerre stupide et inutile, le lendemain même de l’ouverture officielle de la croisade américaine et anglaise pour le pétrole, nous étions tous rassemblés dans le village, monsieur et madame tout le monde, leurs enfants, ainsi qu’une centaine de hippies hirsutes. Ensemble pour une grande fête. Les villageois avaient préparé un festin pour une armée et nous étions tous gavés comme des oies. Musique, théâtre et spectacle de feu, nous leur en avons donné pour leurs lentilles! Il y eut un cercle pour la paix, où plusieurs larmes auraient coulées. Ils nous ont invité à rester avec eux si la situation mondiale devenait critique. Ce fut un moment d’une beauté incommensurable. La veille, nous écoutions parler Medecine Story, un amérindien du Massachusset et vénérable ancien, co-fondateur du mouvement arc-en-ciel il y a de cela 31 ans. Grand-papa nous a raconté l’histoire de la famille depuis le début. Le feu, ce soir là, brillait d’une facon différente. Cette nuit restera gravée à jamais dans ma mémoire. Et à la toute fin du rassemblement, nous avons constitué une équipe d’environ 30 personnes pour un projet communautaire avec les enfants de l’école d’Arapirenga. Pendant une semaine, nous étions logés dans un édifice municipal qui s’est transformé en dortoir arc-en-ciel. Nous avons tous travaillé d’arrache-pied afin d’embellir leur cour d’école d’un joli jardin, chef d’oeuvre d’aménagement paysagiste, considérant les moyens du bord. Nous avons également agrémenté ces journées d’ateliers, de chansons et de contes, où j’ai eu la chance de raconter mes histoires (traduites de l’anglais au portugais)5.  C’était du maudit beau travail de coopération internationale, auquel je suis ravi d’avoir participé. Vive les enfants! J’ouvre ici une parenthèse pour vous parler un peu du Brésil. Ce pays majestueux m’a littéralement surpris, par la grande ouverture d’esprit et la spiritualité de ses habitants. Je dirai même qu’il y a un petit quelque chose qui nous unit, le Brésil et le Québec. Dans la langue, la musique, la beauté de ses habitants(antes), etc… Je ne pourrais vous décrire ce sentiment, mais je me suis senti rapidement chez-moi, pourtant à des milliers de kilomètres du Québec. Les villes sont étonnamment propres en comparaison avec d’autres pays du sud, et partout, on vous accueille les bras ouverts. Le mélange d’autochtones, d’africains (esclavage) et de colons portugais, a donné une saveur métissée à la culture brésilienne, d’une grande richesse. En élisant un dirigeant d’extrême gauche, les brésiliens ont fait un pied-de-nez aux américains, qui ont même lancé des menaces pour leur faire peur, sans succès. C’est comme s’il y avait un mur de brouillard qui nous empêchait de voir clair sur la réalité brésilienne. Il y avait beaucoup de brésiliens(nes) au rassemblement, bien que le début fut un peu timide, ils et elles ont su ouvrir très rapidement leur coeur, pour nous immerger de leur amour cajoleur. Viva el Québec! Les québécois dans cette histoire, ont eu, à ma grande fierté, un rôle important à jouer. Ca tombe bien car nous aimons beaucoup jouer. Propulsés par l’élan de notre dernière fête de famille, à Kokomville6, nous étions forts et beaux7 Avec 12 litres de sirop d’érable, un gros teepee, et nos allures de bûcherons, nous nous sommes fait remarquer. D’ailleurs, le campement québécois était pour beaucoup, un des endroits des plus agréables. Armés de crêpes et de guimbardes, nous partagions avec exaltation notre joie de vivre et notre grand coeur. Nous chantions beaucoup, des chants arc-en-ciel, bouddhistes, amérindiens, etc… Et nous offrions notre spiritualité, aux teintes de l’Amérique autochtone. Plus ou moins une trentaine, nous étions présents et actifs dans tous les domaines du rassemblement, la construction, la cuisine, l’approvisionnement, la traduction, etc… Partout les québécois oeuvraient sans arrêt (bon j’exagère un peu, on se reposait bien un p’tit 5 minutes par jour hi!hi!). Nous formions un groupe uni, un bel exemple pour le reste de la famille. Politique arc-en-ciel Bien que le mouvement arc-en-ciel se veuille le plus gros organisme non officiel au monde, sans chefs ni autorité, nous avons quand même un protocole qui est généralement accepté et appliqué par la majorité. Nous sommes tous égaux, et chacun(unes) est un shanti seena8, un gardien(enne) de la paix. C’est dans un cercle de vision que se prend les grandes décisions. Et ce, par consensus absolu. Nous choisissons dans ces conseils, entre autres, le lieu du prochain rassemblement. En 1999, en Inde, à la dernière Koumbamela9, un groupe de guerriers(ères) de l’arc-en-ciel s’est réuni pour discuter d’un potentiel rassemblement mondial. Ils ont choisi l’Australie pour le premier rassemblement international de la famille arc-en-ciel de l’an 2000. Ce fut ensuite le Zimbabwe, en Afrique pour 2001, et nous dûmes attendre 2 ans avant le 3ieme rassemblement planétaire du Brésil. J’y ai appris énormément sur l’organisation, les relations publiques, les résolutions de conflits. Lorsque des centaines, parfois des milliers d’individus se rassemblent en un même endroit, ca fait jaser. Nous devions faire face aux municipalités, l’environnement, les propriétaires terriens, etc… À travers multiples cercles de conseils et des rencontres avec les autorités, nous tentions tant bien que mal, de mener à bon port ce navire multicolore. Pour nous permettre d’y voir clair dans l’organisation, nous avions différents conseils, qui se réunissaient régulièrement. Un conseil bancaire, pour gérer l’argent du chapeau magique ( le rassemblement ne fonctionne que sur donations volontaires), un conseil cuisine, un conseil d’approvisionnement. Heureusement qu’il y avait des frères et soeurs plus expérimentés dans les gros rassemblements. Pour le ravitaillement, ce n’était pas du gâteau (à vrai dire surtout des fruits!). Imaginez nourrir 1000 personnes au sommet d’une montagne. La famille a eu l’initiative de louer un gros camion tout terrain et son chauffeur, pour toute la durée du rassemblement. Jefferson nous a été utile à mille reprise au moins. Nous devions créer un réseau de fermiers et marchands pour nous fournir la quantité de nourriture et matériel que nous avions besoin. Et ce en portugais. Le facteur langue est d’ailleurs une aventure de plus pour les rassemblements mondiaux, qui rajoute une difficulté supplémentaire. Parfois, nous faisions livrer la marchandise en chars à boeufs. C’était très rustique. Voir des dizaines de seaux de mangues fraîchement coupées, et encore d’autres de papayes et de fruits de la passion, ca faisait chaud au coeur (et aux papilles gustatives) et faisait oublier les difficultés de parcours. Des fruits qui mûrissent Le conseil de vision du Brésil dura 13 jours, qui paraissaient interminables... Toute la journée, jusqu’au coucher du soleil  (aucune décision ne peut être prise, si on ne peut voir les yeux de tous les membres du cercle), nous discutions à l’aide d’un bâton de parole10, dans le teepee québécois. Où et quand serait le prochain rassemblement mondial? Les Québécois en avaient long à dire. Il est maintenant temps de vous dévoiler une des raisons principales qui nous a incités à venir aussi forts et nombreux au Brésil. Une idée a germée dans la tête de Sun Bô, un ancien de la famille québécoise, qui a participé à plusieurs rassemblements aux États-Unis, en Europe, et au Québec. Cette idée, nous en avons parlé à l’époque où nous vivions ensemble en communauté au Témiscouata11, puis nous en avons parlé l’été dernier, au rassemblement québécois. Inviter la famille mondiale au Québec!! Et c’était bien cette mission qui nous motivait et nous rendait si enthousiastes. Bien que plusieurs témoignages sur la force et la grande hospitalité de la famille québécoise par de nombreuses personnes, nous nous sommes butés à quelques obstacles. Certains(ennes) voulaient la Thaïlande, d’autres cherchaient des bibittes au Québec (pas juste des maringouins!). Finalement, au terme du 13 ième jour de conseil, plusieurs conscensus ont été adoptés. Voici donc, quelques-uns des fruits qui nourriront bientôt la conscience de l’humanité. -En décembre 2003, aura lieu en Argentine,  le premier rassemblement de l’arc-en-ciel, continental de l’Amérique du Sud. -En Mars 2004, le 4ième rassemblement mondial arc-en-ciel, au Costa-Rica -Et… Attachez bien vos tuques, en Août 2004, le 5ième rassemblement mondial de l’arc-en-ciel, de l’île de la tortue12, au Québec!!! Quoi qu’il en soit, je suis persuadé que nous aurons beaucoup de visites l’été prochain, qui nous aideront à prier pour la paix et la guérison de la terre.  Je connais déjà des brésiliens(enes), des francais(aises), des américains(aines) qui feront leur possible pour être de la partie. Avant que je ne découvre l’arc-en-ciel, il y a de cela 8 ans maintenant, j’étais orphelin. Et depuis, j’ai trouvé ma vraie famille. Celle des troubadours, des gitans, des shamans et sorcières, de tous les êtres qui aspirent à la lumière. Même après tout ce temps, je n’arrive pas encore à saisir toute la magie et l’impact que ces célébrations familiales, ont sur notre univers. Avec le rassemblement mondial du Brésil, j’ai vu ma famille grandir considérablement. J’ai maintenant une vaste vue d’ensemble sur ce mouvement coloré qui apporte tant de bien-être dans le visible et l’invisible. Je crois désormais vouloir être présent à tous les prochains rassemblements de la famille planétaire. Que ce soit en Russie, ou en Indonésie. Puisse le Grand Esprit m’accorder cette grâce. « Somewhere, over the rainbow, blue birds fly, and I, over the rainbow, dream of a lulluby…”  Je dédis ce texte à tous mes frères et soeurs de l’arc-en-ciel, où que vous soyez dans le monde. Je nous aime. Merci, obrigado, gracias, thank you, arigato. Saalam Alékoum

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