Situation et futur du chanvre au Quebec

par Gabriel Gauthier Après 60 ans d’interdiction de culture de tout type de chanvre confondu, le cannabis sativa, de son nom latin, est redevenu une culture possible depuis 1998, sous certaines conditions bien sûr. Être agriculteur depuis au moins 3 ans, mettre en culture un minimum de 4 ha pour le grain et la fibre et 1 ha pour la semence, obtenir les permis avant d’acheter la semence qui doit, bien entendu, être certifiée et autorisée en raison de sa faible teneur en THC (résine psychotrope et sexuelle de la plante) et n’avoir aucun dossier criminel. En 1998, plusieurs agriculteurs se sont lancés dans cette aventure qui promettait d’être fructueuse. Cependant, bien qu’il y ait des milliers d’applications possibles, la longue absence du cannabis avait laissé un vide au niveau des marchés, des technologies et des génétiques. Malgré tout, de belles expériences ont été réalisées : les génétiques européennes se sont bien adaptées à  notre climat. Depuis lors, des variétés canadiennes ont même été développées et certifiées. Pour la récolte, la fauche est un peu problématique, puisqu’il faut protéger les roulements autour desquels la fibre tend à s’enrouler. La presse à balle ronde semble fonctionner néanmoins. Certes, cultiver et récolter semble donc possible, mais reste un problème à régler : qui va acheter la récolte ? Les débouchés commerciaux pour le grain de chanvre que l’on appelle chènevis ont heureusement été rapidement développés en raison des investissements moins élevés et spécialisés que demande cette production. Par exemple, une presse pour extraire l’huile peut être utilisée avec plusieurs autres sortes d’oléagineux, tout comme un meunier peut utiliser ses équipements pour une gamme diversifiée de produits. C’est ainsi que les Aliments Trigone dans la région de Montmagny commercialisent du chanvre décortiqué biologique sous la dénomination «Les moissons du pays». Plusieurs autres débouchés de transformation artisanale pourraient encore être développés avec ce merveilleux grain riche et équilibré. On pense au lait et au tofu par exemple. Les débouchés commerciaux de la fibre sont quant à eux moins évidents à développer. La transformation artisanale est possible et intéressante certes,  mais relève plus d’une démarche Gandhienne (inspirée de Gandhi et son œuvre) que d’une démarche commerciale. La transformation industrielle demande des investissements importants et plus spécialisés pour le défibrage mécanique. Il faut donc un certain volume de vente minimum pour rentabiliser de tels investissements. La fibre industrielle a plusieurs débouchés potentiels, notamment pour la fabrication de pièces automobiles. La pâte à papier est à mon avis un débouché des plus intéressants pour un impact important au niveau environnemental et social. Ma vision idéale du futur de cette production serait composée de quelques usines régionales de défibrage mécanique (coopérative agricole de 50 producteurs) qui pourraient s’unir pour financer et fournir une usine de pâte à papier de chanvre. Ceci impliquerait plusieurs milliers de personnes qui travaillent ensemble dans un esprit de coopération et de service. Qui de nos jours, n’a jamais utilisé de papier?… Et qui peut s’en passer ? Il est une aberration qu’il faudra bientôt rectifier:  utiliser des arbres vieux de 100 ans pour éditer des nouvelles qui passent trois jours sur la table… La chènevotte est le sous produit du défibrage mécanique, le bois de la plante. C’est une matière très siliceuse qui présente des caractéristiques d’absorption et de structure cristalline très intéressantes. J’œuvre présentement à développer un débouché des plus intéressants pour cette matière: un matériau et procédé de construction écologique aux multiples qualités. (Voir l’article La construction en chanvre dans Aube #1: Passage). Vous y comprendrez que j’ai un grand intérêt pour le développement du chanvre à fibres au Québec. Plusieurs options sont possibles pour avancer dans ce sens. Il est évident que, dans un premier temps, l’offre de se construire avec du chanvre en provenance de l’Ontario permet d’amorcer une demande pour cette matière. Comme je souhaite que la cause se rende plus loin, je suis à la recherche de personnes intéressées et expérimentées  pour s’impliquer à développer des méthodes et technologies de transformation alternatives qui seraient plus accessibles et moins coûteuses. Le chanvre en est encore au stade de l’émergence au Québec et appelle tous les génies que vous êtes à vous manifester. Si cette cause vous parle ou que vous désirez en savoir plus, prière de me contacter.

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