Pour ajouter son grain de SEL

par Sarah Maria L’idée des SEL a germé dans la tête de Michael Linton dans les années 80, un résident de l’Ile de Vancouver qui en avait assez de voir tant de gens réduits à l’inactivité, sans argent, alors qu’ils avaient tant de savoir à partager, tant de compétences à offrir. Il a intitulé ça LETS : Local Exchange Trade System. Depuis, plus de vingt mille (20 000) personnes dans le monde utilisent ces genres de systèmes, à travers plus de trois cents (300) groupes. Linton a même écrit un bouquin à ce sujet, ‘’LETS Design Manuel.’’ Il préconisait des échanges alternatifs avec une monnaie différente de la monnaie courante (pour ne pas que les rechercheurs de profit puissent jouer avec les systèmes), mais ayant une valeur relativement égale, pour éviter la confusion. Il ne voyait pas ça comme une alternative, mais comme un ajout. Les règles établies se limitaient à: pas de propriétaires (un Conseil d’administration (C.A). élu démocratiquement parmi les membres du SEL), pas d’obligation d’échanges, pas de tricherie (rapport de confiance), pas d’intérêts. J’ai fait le tour sur Internet de différents groupes dans le monde, particulièrement en France et aux Etats-Unis. Je sais qu’il existe des SEL au Canada (réseau MULTILETS ou INTERSEL) et au Québec, un à St-Georges de Beauce, un en Gaspésie, mais leurs sites n’étaient pas disponibles- je vous encourage à aller voir. Il y a aussi un Guide Ressources vieux de deux (2) ans dans lequel on en parlait et on donnait toutes les adresses des SEL au Québec. Je vais vous faire un résumé des différents groupes que j’ai étudiés. Il est difficile de résumer les fonctionnements des SEL puisque -comme il est dit sur le réseau des SELidaires en France (voir adresses Internet en bas)- TOUS LES SELS SONT DIFFÉRENTS, CHAQUE SEL NE REPRÉSENTE QUE LUI-MÊME puisqu’autogestionnaire et non-centralisé. Mais…c’est quoi un SEL, au juste ? Un Service d’Échanges Locaux, c’est un système associatif permettant à un groupe d’une même zone géographique plus ou moins grande, d’échanger des services, des savoirs, des biens, avec une comptabilité en unités locales. L’idée de la Bourse d’Échanges Locaux Libres et Équitables (BELLE), en France, résume bien selon moi le pourquoi de cette alternative, et correspond aux autres raisons que j’ai trouvées ailleurs :
  • Faire prendre conscience de la dimension humaine existant derrière tous les échanges, en valorisant les savoirs et le savoir-faire mal reconnus dans notre société actuelle.
  • Promouvoir la solidarité dans le cadre d’un développement local, grâce aux échanges multiples des savoirs, services et biens.
Au pays de Romans (France) on lit :- Améliorer la situation matérielle des moins fortunés, avec des unités de valeur plus équitables. Je retrouve aussi dans les chartes des SEL des notions de convivialité, d’humanisme, de non-violence, de respect des différences de religion et d’idéologie, d’écologie (par exemple le SEL de Grenoble parle de réduire la pollution liée au transport avec du covoiturage organisé), d’équité, de non-recherche de profit, d’autogestion, de responsabilité individuelle (tous s’entendent pour dire qu’ils ne jouent pas le rôle de police, que c’est à chacun d’avoir de l’honnêteté), de transparence, de communication, de créativité…hum… ça me rappelle quelque chose! Les offres et les demandes peuvent se faire pour un tas de choses, en services et en produits. En Essone (encore en France), on retrouve les catégories suivantes : Maisons et jardin, Alimentation, Vêtements, Bâtiments, Transports, Arts, Sports, Éducation, Informatique, Soutien et Santé; les produits allant d’un appareil ménager au mobilier, de location de costumes à la vente d’un livre. Dans le Trégor (en Bretagne), on parle de tartes aux fruits, de contes, de cours de piano… nous, dans le SEL récemment fondé à Rimouski, nous parlions de produits de l’herboristerie, de services de clown, de cours de cithare, de soutien aux devoirs… Les unités d’échange On les nomme grains d’orge, flocons, bigorneaux, piafs, clous, noix, dans les différentes régions de France, ou Time-Dollar, Ithaca-Hour aux Etats-Unis, Tlaloc au Mexique, Heures, Grains de sels au Québec. En France, ça varie entre 50 et 60 unités par heure, sans que j’aie vu de correspondance à leur monnaie courante nationale. Un plafond est instauré, qui varie entre 2000 et 3000 unités, dans le positif ou le négatif. Ce plafond peut être changé avec l’approbation du C. A. et doit être remboursé (si dans le négatif) lorsqu’une personne quitte le groupe. Aux Etats-Unis, 1 Time-Dollar = 1 heure, ou bien il y a correspondance avec la monnaie nationale : 1 Ithaca Hour correspond à 10$, il y a des coupures pour ? h, (5 $), ? d’h (2,50 $), ou 2 h (20 $). Au Mexique, le groupe Altra Balsa des Valores (ABV) a pour unité 1 tlaloc = 1 heure, ou 25 pesos. Pour les produits, on peut payer une partie en pesos, mais au moins 10 % doit être donné en tlalocs, idée que je trouve fort intéressante. Un bon d’échange donne le droit à dix (10) transactions, après on échange le bon contre un nouveau. À Rimouski, on n’a même pas de billets, on échange tout simplement en heures avec un plafond de 15 heures. Une question soulevée : si le matériel est plus coûteux (par exemple en dentisterie) ou le travail demande préparation (thérapies diverses)? Le groupe ABV fonctionne avec une valeur pouvant varier de 1 à 4 unités, selon l’entente faite entre les particuliers. À Grenoble, les heures de préparation sont comptabilisées dans les heures de travail. Quand l’activité ne mobilise pas, les personnes à 100 % ( gardiennage d’animaux, transport), le taux horaire est plus faible. Il est évident que tout est une question de bonne volonté entre les les SELiens ! Fonctionnement Gérer un SEL, ça demande quand même du temps et de l’administration : gérer les comptes d’offres et de demandes, les adhésions et les réadhésions, l’accueil des nouveaux membres, les informations, les locaux, les réunions, les activités, les catalogues ou bulletins de liaison entre les membres. La plupart des SELS ou des LETS ont des journaux où sont écrits les offres et les demandes, les divers ateliers, rencontres et fêtes organisées entre les membres, les différents comités dans lesquels on peut s’impliquer, et même pour certains, des articles traitant d’écologie, de mondialisation, de petites annonces activistes. Nous pourrions avoir une section SEL dans l’Écho des Villages. Les employés ne reçoivent pas de rémunération en monnaie courante la plupart du temps (certains groupes font des demandes de subventions gouvernementales pour avoir de la permanence, comme à Paris où il y a beaucoup de monde!), mais sont payés en unités d’échange. Par exemple, en Essonne, c’est 50 grains d’orge/h. On encourage évidemment le maximum de gens à participer aux tâches administratives. D’habitude, un montant minimal est prélevé à l’adhésion, soit en monnaie courante, soit en unités d’échange. En Essonne, ça varie de 60 à 120 francs, selon les revenus de la personne et si c’est une famille. À Paris, c’est 150 piafs, donc 3 heures 20 de services. Aux Etats-Unis, à Ithaca, la cotisation est symbolique : 1 $ par an ! On voit aussi que certains groupes donnent des unités au départ pour encourager les échanges. En Essone, c’est la corne d’abondance de 1000 grains d’orge par année, à Paris 500 piafs. À Rimouski, on ne prélève rien et on ne donne rien. Mais nous ne sommes qu’à nos premières notes! Des membres des SEL sont élus pour devenir membres du C.A. À Paris, ça varie entre 5 et 13 membres dans un conseil, élus pour un an. Dans la plupart des SEL, il y a des Assemblées Générales des membres à chaque année. Des résultats ? À Ithaca, le marché d’alimentation GreenStar fonctionne en Ithaca Hours, ainsi qu’une banque(ACU) et les fameux Ben and Jerrys. Un resto de la place, Viva Taqua, a adopté cette unité d’échange et le Taco Bell (Mc Do simili mexicain) a fermé! Dans d’autres villes, avec le Time-Dollar, les membres coopèrent avec les administrations municipales, nationales, fédérales américaines. Par contre, à la différence des européens qui ont beaucoup de liens entre les membres, des activités, des fêtes, aux Etats-Unis, en général, il n’y a que des contacts d’échanges d’unités. Comme quoi il y a toujours place à l’évolution! Depuis mai 1996, à Paris, il y a eu plus de 5000 échanges, et les membres sont passés de 20 à 500! Finalement… Ce que je vois là-dedans, c’est la possibilité d’établir un système éventuellement alternatif, basé sur le respect. À Grenoble, une chose est soulignée que je trouve intéressante: les règles, s’il y en a le moins possible, c’est pour qu’on trouve du plaisir à échanger, à négocier nos trocs ! À donner et à recevoir, en ayant toujours la solidarité à l’esprit (reconnaître les moyens de chacun). Référence: http://francinet.free.fr

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